Si l’histoire de l’antre du Beerschot en lui-même est relativement limpide, retracer la vie du club résident au Kiel depuis 1899
est une autre histoire : le Beerschot a toujours été un club instable et à la réputation sulfureuse.
Résumé de l’histoire d’un stade à l’importance mondiale.
Alors que la ville d’Anvers vit déjà au rythme du football depuis 1880 grâce au Royal Antwerp FC, un nouveau club est fondé en
1899 au sud de la ville portuaire.
L’origine de ce nouveau club est une installation sportive créée sur un ancien hippodrome. D’ordinaire, un club est fondé puis
il cherche un terrain pour y évoluer. Dans le cas du Beerschot, c’est le contraire puisque le club a été créé pour occuper des
installations déjà existantes. Ainsi, le nouveau club est fondé par Ernest Grisar le 3 septembre 1899 et ses couleurs seront le
mauve et le blanc. L’origine du nom du club provient du site où il a été fondé : le Beerschotshof est un parc situé à
proximité immédiate du stade. Quant au nom du stade, il était aussi déjà trouvé : on parlera dans un premier temps du Kielstadion,
du nom du quartier où il est implanté. Grisar décède rapidement mais son fils Alfred reprend les rênes du club.
Le club, répondant donc au nom de Beerschot Athletic Club, a une vocation omnisport et outre le football, possède des sections en
hockey, tennis et en sports athlétiques.
En 1900, afin de garnir son équipe, Alfred Grisar n’hésita pas à contacter de nombreux joueurs de l’Antwerp. Ceux-ci déçus de la défaite
du Great Old lors d’un test-match contre le Racing de Bruxelles pour l’attribution du titre n’hésitèrent pas et rallièrent le club
du Kiel. L’Antwerp se retrouva sans joueurs et se mis en inactivité. Il n’en fallait pas plus pour créer une rivalité tenance qui perdure
encore de nos jours. S’il y a bien une ville où les supporters des deux clubs principaux se haïssent au plus haut point, c’est bien à
Anvers qu’on peut les trouver.
L’affiliation du club à la fédération belge lui permet de participer au championnat. Le Beerschot terminé deuxième derrière le Racing de Bruxelles lors de sa première saison. Ce résultat prometteur n’allait pourtant pas avoir de suite et le Beerschot eut le triste honneur à devenir le tout premier club relégué en Belgique. Le nombre de clubs ne cessant d’augmenter, la fédération n’eut d’autre choix que de créer plusieurs divisions pour permettre aux nombreux nouveaux clubs de jouer. Ainsi au terme de la saison 1905-1906, le Beerschot chuta dans la nouvelle deuxième division tout juste créée.
L’attribution des Jeux Olympiques de 1920 à Anvers tient de quelques circonstances exceptionnelles. En effet, la VIIe édition devait
être attribuée à Berlin mais le déclenchement de la Première Guerre Mondiale en décida autrement. Une fois le conflit terminé, une
nouvelle désignation est organisée en 1919 à Lausanne. Etaient en lice Amsterdam (Pays-Bas), Lyon (France), Atlanta, Cleveland,
Philadelphie (Etats-Unis), Budapest (Hongrie) et La Havane (Cuba).
Budapest fut dans un premier temps désignée ville-hôte mais comme cette ville faisait partie de l’ancien empire austro-hongrois
allié de l’Allemagne, elle fut retirée du vote, à l’instar des villes allemandes, autrichiennes, ottomanes et bulgares. Ces évictions
étaient contre l’avis de Pierre de Coubertin mais les ravages de la Grande Guerre étaient encore trop vivaces. C’est ainsi qu’Anvers
reçut les Olympiades afin de rendre hommage aux souffrances infligées au peuple belge durant le conflit.
Immédiatement, la cité portuaire a dû construire ou adapter de nombreuses installations sportives. Ainsi, un bassin de natation, un
palais de glace, le Country Club d’Hoogboom et divers autres sites (notamment à Ostende et à Bruxelles) furent construits ou adaptés,
en plus évidement du stade du Kiel. Le stade fut agrandi à 35.000 places et un décor d’inspiration grecque est installé autour des
tribunes. De plus, un imposant pavillon est construit à l’entrée du stade et fera office d’entrée officielle. Le stade comporte deux
tribunes latérales assises (de deux étages) et deux virages avec des places debout. La piste d’athlétisme a été mise au point par le
britannique Charles Perry, le premier grand spécialiste mondial des pistes d'athlétisme. Quant au stade lui-même, il aurait été en
partie conçu par l’architecte anglais Archibald Leitch, très célèbre à l’époque pour avoir construit les stades de Liverpool, des
Rangers et du Celtic Glasgow, d’Arsenal, des deux stades de Manchester, de Chelsea et de Tottenham notamment.
Deux symboles des Jeux ont aussi fait leur première apparition à Anvers : le drapeau et le serment. Ils sont tous les deux encore bien
présents aujourd’hui.
Parmi les faits d’arme, notons la performance du finlandais Paavo Nurmi. Ce dernier a non seulement remporté l’épreuve du 10.000m,
du cross individuel et du cross par équipe, mais aussi la seconde place du 5.000m.
Autre vedette de l’époque, la tenniswoman française Suzanne Lenglen. Elle remporta trois médailles en gagnant les titres du simple
dames et du double mixte.
Médaille d'Or des Jeux Olympiques 1920
Quant au foot, les Diables Rouges seront couronnés champions olympiques dans des circonstances particulières. Les belges, exempts du
premier tour élimineront en ¼ et ½ finales l’Espagne et les Pays-Bas. En finale, ils affrontèrent la Tchécoslovaquie
dans stade du Kiel comble. Las, les tchécoslovaques abandonnèrent le match à la 39e minute prétextant un arbitrage défavorable. Ils
furent disqualifiés et les belges sacrés champions olympiques. Mais les problèmes en football ne s’arrêtèrent pas pour autant. Le match pour
désigner les médaillées d’argent et de bronze ne put avoir lieu puisque les français étaient déjà rentrés chez eux. Un second tournoi
fût organisé entre l’Italie, la Norvège, l’Espagne et la Suède d’un côté, et de l’autre un match amical entre l’Egypte et la Yougoslavie.
L’Espagne se hisse ne finale contre les Pays-Bas (précédemment éliminés par les belges) et remportent la médaille d’argent devant les
néerlandais.
Le titre des belges reste à ce jour le plus grand exploit des Diables mais il est souvent occulté. Les circonstances de la victoire et
l’invention de la Coupe du Monde dix ans plus tard n’aideront pas à garder en mémoire cette médaille d’or.
Les Jeux terminés, les décors olympiques sont malheureusement démolis et le Beerschot peut reprendre pleinement possession de son
stade. La figuration que faisait avant-guerre les Mauves et Blancs devient une domination du foot belge. Entre 1922 et 1939, pas
moins de 7 titres seront décernés aux beerschotmen (1922, 1924, 1925, 1926, 1928, 1938 et 1939). La Seconde Guerre Mondiale mettra
un terme à cette domination et le vieux club devra attendre les années 70 pour de retour gagner des trophées : la Coupe de Belgique
sera remportée en 1971 (face à Saint-Trond) et en 1979 face du Club Brugeois.
Le Beerschot rentra par la suite dans le rang mais réussi tout de même à rester en D1 pendant 73 ans. La mort du président Pierre Stoop
en 1976 devint synonyme de descente aux enfers pour le club du Kiel. Une première fois relégué pour tentative de corruption en 1981
contre le Beringen FC, le club remonte de suite mais la chute continua de plus belle.
Les années 80 et 90 seront pour le club deux décennies noires. Entre redressements fiscaux (dû notamment à des faux en écriture ou aux
fraudes fiscales) et relégation administrative en Division 3 (suite à une situation financière catastrophique). La saison 1990-1991 sera
la toute dernière en Division 1. Remontant de suite en Division 2 à la fin de la saison 1991-1992, le vieux club réussira à s’y stabiliser
quelques années mais échouera à remonter en D1. Finalement, en 1999, le Beerschot termine dernier et est relégué en... Promotion. Exsangue,
le club déclare forfait ne jouera jamais en quatrième division. Le prestigieux matricule 13 est radié et toute son histoire est balayée.
Pendant des décennies, le club n’a plus été en mesure d’entretenir son vieux stade. Les seuls travaux d’envergure ont été la création de
loges à la place du premier étage de la tribune principale. Mais le reste des installations tombe en ruine et le second étage de la
tribune latérale doit être démoli au début des années 90. La capacité tombe à 14.000 places.
Le 12 juin 1999, le Beerschot n’est plus et ses nombreux partisans se retrouvent sans rien.
Le club aura existé pendant 99 ans et 9 mois.
Pourtant, le Kiel ne peut rester inoccupé. Ce stade a un tel passé qu’une solution est vite trouvée pour redonner vie au site.
Le Germinal Ekeren, petit club passé des séries provinciales à la D1 en quelques années, est confronté à un stade trop petit et
impossible à agrandir. En effet, le Veltwijckparkstadion est coincé dans un site classé et devra à terme être démoli. Pourtant,
le club connait un réel succès sportif mais ne peut compter que sur quelques supporters.
Le club déménage au Kiel, adapte ses couleurs (à l’origine rouge et jaune, le mauve du Beerschot est ajouté) et change son nom en
Koninklijke Football Club Germinal Beerschot Antwerpen, le nouveau logo reprenant les éléments principaux des deux anciens clubs.
Le nouveau Beerschot ne peut par contre plus se satisfaire d’un stade en ruine. Rapidement, trois tribunes sont démolies et
remplacées par de nouvelles constructions abritant exclusivement des places assises. De plus, la célèbre piste d’athlétisme
disparait et le Kiel devient un stade à l’anglaise. Du stade des Jeux, il ne reste que le deuxième étage de la tribune principale.
La capacité est fixée à 12.771 places assises.
Le club poursuit sa progression et remporte la Coupe de Belgique en 2005, face de nouveau au Club Brugeois. On pense à l’époque que le
nouveau Beerschot est sur les bons rails mais les vieux démons reviennent hanter les travées du Kiel.
Tiraillé entre les anciens partisans du vieux Beerschot et les dirigeants issus de l’ancien Germinal, le club redevient instable et les
résultats sportifs en pâtissent. Le matricule 3530 flirte avec la Division 2 pendant plusieurs saisons.
Peu à peu, les dirigeants du Germinal sont éjectés et le club change de nom : on parle maintenant du Koninklijke Beerschot Antwerpen
Club (matricule 3530) et les couleurs rouge et jaune disparaissent.
Malheureusement, à la fin de la saison 2012-2013, le club ne reçoit pas sa licence professionnelle et est relégué en Division 3. Comme
en 1999, le club jeta l’éponge et le matricule est radié.
C’est la fin de la seconde version du Beerschot.
L’histoire repasse les plats...
Le même scénario qu’en 1999 est mis en place. Le stade Kiel (cette fois en parfait état) doit impérativement retrouver un club et
cette fois, c’est le Koninklijke FC Olympia Wilrijk (matricule 155) qui est invité à s’installé au Stade Olympique. Une nouvelle
fois, le nouvel occupant s’adapte au passé prestigieux du stade en changeant son nom et son blason en 2013.
Et comme pour l’ex-Germinal, le passé de l’Olympia est effacé progressivement. En 2018, l’URBSFA autorise le club a récupéré le
matricule 13 du Beerschot original. Et un an plus tard, le club est rebaptisé Koninklijke Beerschot Voetbalclub Antwerpen. L’Olympia
Wilrijk n’existe plus.
Pour le moment, la 3e incarnation du Beerschot n’a pas encore réussi à réintégrer la Division 1 mais semble être enfin devenue
plus sage.
L’avenir nous dira si le Beerschot saura s’inscrire dans le futur ou s’il est condamné à être un nom maudit du foot belge.
Pour finir, petit résumé des différents appellations des clubs ayant joué au Kiel :
La tribune principale et seule construction du Kiel à ses débuts.
De nouvelles tribunes, un portique monumental, des colonnades et un grand pavillon d’entrée sont construits, le stade peut accueillir 35.000 personnes.
Le monumental pavillon d’entrée.
L’intérieur du stade (1/2)
L’intérieur du stade (2/2)
Cérémonie d’ouverture le 20 août 1920. Pour la première fois, le drapeau olympique est hissé et le serment olympique prononcé par l’escrimeur belge Victor Boin.
L’épreuve de tir à la corde, devant le portique de l’horloge.
Le français Joseph Guillemot remportant le 5.000m devant le finlandais Paavo Nurmi.
Les Diables Rouges, vainqueurs de l’ancêtre de la Coupe du Monde de Football.
L’Uruguay a le droit de porter deux étoiles suite à ses deux victoires aux Jeux Olympiques (1924 et 1928) mais pas la Belgique !
Après les Jeux, le stade sera amputé de ses décors mais restera presque inchangé jusqu’à la fin du XXe siècle.
Le Kiel, après les Jeux Olympiques.
L'équipe du Beerschot posant devant la vieille tribune latérale.
Au tout début des années 90 : les gradins et les vieilles tribunes sont toujours debout. Une toiture a simplement été ajoutées au-dessus des virages.
La tribune latérale. Croulant sous son grand âge, elle sera détruite vers 1991. Une nouvelle toiture abritera le premier étage laissé intact.
Le Kiel, juste avant la démolition de la tribune latérale. La tribune principale a déjà été modernisée avec l’ajout des loges.
1999 et la démolition du vieux stade olympique. Une page se tourne...
Un stade moderne n’ayant presque plus de vestiges de son passé olympique.
Un peu plus de 12.000 places assises et couvertes.
La tribune du kop des Rats du Kiel.
Seul vestige de l’ancien stade, l’étage de la tribune principale à droite de l’image.
Trois clubs se sont succédés ici mais les supporter sont toujours présents.
Le nouveau pavillon d’entrée monolithique. On est loin de la recherche artistique de 1920...
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