Il y a un peu plus de 8 ans, j’avais établi une listeNote1 des endroits que
j’aurais vraiment aimé visiter.
Encore aujourd’hui, je regrette d’avoir recommencer l’urbex bien trop tard. Non seulement à l’époque,
l’urbex était un loisir des plus confidentiels (donc sans les nuisibles que l’on retrouve partout et on pouvait réellement se retrouver
seul au monde dans une friche), mais aussi les sites abandonnés foisonnaient partout dans le pays.
Donc, en première position dans cette liste, on peut retrouver le site industriel visité en cette belle journée de mars.
Lieu pourtant hautement historique, presque rien ne subsiste de nos jours. De la première forge construite en 1752 sous les auspices de
l’impératrice Marie-Thérèse de Hongrie et de Bohème à l’immense complexe comportant à la fin 3 hauts-fourneaux, seul le HF2 est encore debout.
Construit en 1909, il s’agit du dernier exemple de ce type de haut-fourneau en Europe. Bien évidemment, les nuisibles politiciens auraient aimé
tout bazarder mais quelques irréductibles tiennent bon et font que la démolition de ce vestige unique soit bloquée depuis 2017.
C’est justement ce dernier souvenir des Forges de Clabecq que je voulais absolument immortaliser. Ces forges symbolisent le début de la
fin de l’industrie lourde en Belgique. Pourtant idéalement situées, entre canaux, voies ferrées et autoroutes, les forges ont été sacrifiées
sur l’autel de la mondialisation en 1997. Après Clabecq, tous les autres hauts-fourneaux et cokeries du pays seront fermés et effacés de
notre paysage.
Théâtre de luttes violentes entre les ouvriers et les cols blancs (on se souviendra de l'expédition punitive à l’encontre d’un curateur), l’outil sera
peu à peu arrêté et le site tombera en léthargie à partir de 2002. De nos jours, seul le laminoir maintient une activité.
Détail amusant : le site appartient toujours à un grand groupe industriel, le même qui a fermé les forges.
Démantelées en plusieurs étapes depuis 2002, les ex-forges présentent aujourd’hui différents visages : le HF2 en cours de
démolition, de vastes terrains dépollués (vraiment ?) et un chantier de construction d’horreurs modernes (en gros, des tours et des
cubes dégueulasses, comme on en voit partout). Tout le site doit, à terme, est reconverti en quartier résidentiel. Mais sans aucune
trace du passé. Pourtant, sans passé, point d’avenir.
Le passé industriel est-il si honteux au point de vouloir l’oublier ? Ou vaut-il mieux effacer les cicatrices et ainsi oublier les
responsabilités des patrons, des banques et du monde politique dans le bain de sang social qu’aura été la fermeture des Forges de
Clabecq ? Poser la question apporte un bon élément de réponse, non ?
La visite s’est faite sous la bonne garde de caméras de surveillance. Ont-elles rempli leur office ? Je n’en sais rien, je ne suis pas
resté sur place suffisamment longtemps pour vérifier.
Dans ma précipitation, j’ai oublié d’aller voir le plancher de coulée, là où la fonte sortait du haut-fourneau. Lors de l’exploitation,
ce lieu était le plus spectaculaire, avec la fonte semblable à de la lave sortant d’un volcan. Dommage...
Un panneau « voie sans issue » aurait été plus judicieux...
Sous le monte-charge Staelher, désormais le dernier en Europe.
Bien qu’il ne reste qu’un infime partie du site industriel, on s’y sent encore tout petit face à ce monstre d’acier.
Les injecteurs d’eau, refroidissant la paroi du haut-fourneau.
Gros plan sur un injecteur de charbon pulvérisé.
La même chose, sans l’injecteur. Malheureusement, il est impossible de monter plus haut.
Les deux Cowpers, des échangeurs de chaleur, servant à réchauffer fortement l’air injecté dans le haut-fourneau.
Avant la démolition, on retrouvait un second haut-fourneau, en tous points identique à celui-ci.
L’énorme tuyau cylindrique amène l’air chaud des cowpers vers le creuset du haut-fourneau.
Le vénérable château d’eau. Le site en comptait plusieurs si ma mémoire est bonne.
Parfait, l’intérieur est encore complet mais...
... la rouille grignotant les escaliers me convaincra de ne pas monter au sommet.
Le haut-fourneau n°2, dans son ensemble.
La benne Staelher, apportant le coke au gueulard, c’est-à-dire au sommet du haut-fourneau.
Le monte-charge. À droite se trouvait le HF6, construit en 1972 et dynamité en 2012.
L’ascension semble possible (et tentante !) mais...
... une vilaine torsion et un appui dans le vide me font penser qu’escalader cette structure peut conduire à une mort violente.
Le somment typique du haut-fourneau, qui a marqué le paysage pendant plus d’un siècle.
Le fait de conserver ces vestiges ne devraient même pas être remis en question. Sauf en Belgique...
Soyez le premier & devenez quelqu’un de bien • Be the first & become a good person