Écologisme de façade

Mouscron, écologisme, béton. Trois termes qui ne vont pas ensemble.
Pourtant, ce mariage forcé est une réalité.

img > Parc de Mouscron

img > Josh Josh | Webmaster
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Publié le 14 novembre 2024

Depuis que la prise en compte du facteur environnemental est devenue populaire pour nos décideurs politiques, la Ville de Mouscron ne cesse de crier sur tous les toits que cette ville devient de plus en plus verte et que de gros efforts sont faits en matière de biodiversité.
Bien entendu, ce ne sont que des paroles politiciennes qui sont forcément fausses, ou à tout le moins tronquées.
On va tout démonter dans les lignes qui suivent.

Un poumon vert martyrisé

Aussi, pour appuyer cette démarche d’écologisme (de façade), la Ville de Mouscron a entrepris d’entretenir le vénérable parc communal. Il faut dire que le seul espace vert digne de ce nom de la ville a été laissé à l’état de quasi abandon pendant près de 30 ans. Bien entendu, il fallait intervenir, notamment en curant les étangs, mais pas n’importe comment !
Si l’on suit le programme concocté par la Ville :

Dès le mercredi 15 mai 2024, la première partie des travaux d'aménagement des bassins débutera par le rabaissement de la nappe.
La majeure partie des travaux se déroulera ensuite à partir de septembre 2024, pour une transformation finale et un paysage magnifique visible au printemps 2025, sauf si les intempéries retardent le chantier.
Voici le détail des travaux qui sont prévus pour réaménager les bassins et pour lesquels la Ville de Mouscron investit quelque 777.000€ sur fonds propres :

img > Esquisse parc de Mouscron

Les esquisses ne sont jamais fidèles à la réalité...
© Ville de Mouscron

  • Rabaissement de la nappe pour les travaux
  • Sécurisation des travaux
  • Curage des bassins et séchage des boues
  • Remise en état des berges et végétalisation
  • Suppression des îlots (soucis de gestion et lieu de ponte des bernaches du Canada - espèce invasive)
  • Reconstruction du pont sous forme d'une petite esplanade avec système de gestion des niveaux d'eau
  • Système de gestion des mouvements d'eau (pompe) et chute d'eau au niveau du kiosque
  • Réhabilitation de la rivière
  • Nettoyage et entretien du pont historique
  • Construction d'un pont en bois
  • Végétalisation et sécurisation des abords
img > Esquisse parc de Mouscron

« Hâte » de voir le résultat...
© Ville de Mouscron

Il s'agit assurément d'un bel investissement pour le parc et l'amélioration de son cadre bucolique tout en misant sur l'avenir.
Note1

Reprenons donc ce beau programme :

  • Rabaissement de la nappe pour les travaux : pour se faire, des pompes sont alimentées par un magnifique générateur diesel qui crache ses gaz à hauteur de visage depuis début juin. Quand on nous rabâche sans cesse qu’il faut faire attention aux émissions nocives, il y a de quoi rigoler. De plus, les oiseaux restants sont laissés pour compte sans point d’eau digne de ce nom depuis des mois.
  • Curage des bassins et séchage des boues : donc, depuis début juin, des pompes s’évertuent à vider les étangs. Peine perdue puisque que les autorités et l’entrepreneur n’ont pas compris comment fonctionnent ces étangs. Un cours d’eau naturel y passe et tous les avaloirs du parc déversent l’eau de pluie dans lesdits étangs. A chaque pluie, ils se remplissement.
    Je n’ose imaginer la quantité de diesel gaspillée en pure perte depuis des mois.
  • Remise en état des berges et végétalisation et végétalisation et sécurisation des abords : en détruisant TOUTE la végétation existante ? Y a pas un soucis là ? Oui, de la végétation va probablement être replantée, mais un jeune arbuste avec 3 feuilles ne peut pas rivaliser avec un arbre âgé de dizaines d’années en termes d’absorption de CO2.
  • Suppression des îlots (soucis de gestion et lieu de ponte des bernaches du Canada - espèce invasive) : faux ! Les ilots servent de refuge et de lieu de nidification pour les oies et canards du parc, volatiles qui sont sédentaires du parc depuis toujours. Désormais, plus de refuges pour eux. Quant aux bernaches du Canada, elles ne sont qu’une dizaine et il n’est pas question d’une invasion comme on peut en voir ailleurs. La biodiversité dit merci.
  • Système de gestion des mouvements d'eau (pompe) et chute d'eau au niveau du kiosque : les jets d’eau au milieu des étangs ne seront donc pas remis en place. C’est bien dommage parce qu’ils participent à l’oxygénation de l’eau et évite ainsi une eutrophisation des étangs. De plus, si ces systèmes sont de même qualité que ceux installés lors de la création de bassins en béton près de la cafétéria en 2013, ils fonctionneront deux mois avant de tomber définitivement en panne.
  • Construction d'un pont en bois : pour que les plus débiles d’entre-nous puissent jeter leurs déchets plus facilement à l’eau. Le civisme n’existant plus, il arrive régulièrement que le parc soit transformé en certains endroits en dépotoir.
  • Il y avait naguère la création d’un marécage à la place de l’un des étangs. Cette idée saugrenue semble avoir été abandonnée et c’est tant mieux. On ne choisit pas de créer un marécage, on ne peut pas dicter à la nature nos volontés.

Depuis le mois de juin, se promener au parc est tout sauf agréable. J’ai déjà évoqué les émanations du générateur diesel, mais je n’ai pas encore parlé du bruit émis par cette machine. Sans parler de la venue régulière de camions au sein du parc et des tas de boue qui trainent un peu partout.

Être au contact de la nature est bon pour la santé...

Comme je l’ai déjà dit, un entretien était évidemment plus que nécessaire. Mais gaspiller autant d’argent public dans un projet aussi boiteux n’était pas nécessaire. Curer les étangs et réparer les berges auraient suffi, mais cela n’aurait certainement pas été assez pour montrer que le Ville se soucie de l’environnement.
Des aménagements pensés par des gens qui ne viennent jamais au parc, au contraire des riverains et des habitués (dont je fais partie).

img > Parc de Mouscron

L’eau, les arbres et arbustes, les oies, tout a disparu

img > Parc de Mouscron

Un cadre idyllique et apaisant, mais appartenant au passé

img > Parc de Mouscron

Image pathétique qui nous est offerte depuis des mois
On notera l’efficacité du pompage en cours depuis des mois

img > Parc de Mouscron

Faire disparaitre des espèces animales et végétales est bon pour la biodiversité selon la Ville de Mouscron

img > Parc de Mouscron

C’est bien connu, les arbres participent à la stabilité des berges et talus, sauf à Mouscron

img > Parc de Mouscron

Le beau peuplier au centre de la photo (l’un des derniers du parc d’ailleurs) n’en a plus pour longtemps...

Le parc communal a été inauguré en 1932. Avant ce bel espace vert, on y trouvait une décharge publique, qui a été comblée par le nouveau parc. Et bien avant encore, des fortifications s’y trouvaient.
En un peu moins d’un siècle, le parc et ses étangs s’étaient créé un équilibre naturel. Tout ceci a été détruit irrémédiablement en quelques mois.
Le parc communal était réputé pour la diversité des essences d’arbres et pour être l’un des plus beau du pays. Une extension a été créée au début du XXIe siècle, mais elle se résume à trois arbres et deux buissons perdus au milieu d’immenses pelouses anonymes. C’est peut-être de cela que la Ville rêve pour le parc historique. L’architectes du parc, Frans Seroen, doit se retourner dans sa tombe...

Qualité de vie ? Non, densification !

En parlant d’environnement, j’en viens maintenant à la fameuse phrase fétiche de la Ville : « Mouscron devient de plus en plus verte ». Là aussi, le mensonge est sympa.
Il y a bien longtemps que cette ville a été livrée aux promoteurs immobiliers. Partout, des maisons individuelles sont rasées pour laisser place à des blocs d’appartement. D’ailleurs, la Ville ne s’en cache pas puisque la densification maximale du centre-ville est au programme du collège communal.

Les disponibilités en terrains non bâtis dans le centre-ville sont particulièrement faibles (8,1 ha). Le respect des principes d’affectation du sol tels que proposés par le schéma des options territoriales impliquerait la création de près de 8.000 nouveaux logements, soit une densité théorique de 528 logements à l’ha pour les nouveaux projets sur les parcelles encore libres.
Cette densité théorique pour les nouveaux projets est bien évidemment inatteignable. Cependant, pour tendre vers l’objectif des 60 logements à l’hectare pour l’ensemble du centre-urbain, d’autres possibilités de densification sont envisageables à travers la reconstruction de la ville sur la ville.
Note2

Ainsi, l’entassement de population au détriment de la qualité de vie devient la priorité numéro 1 pour la Ville, et pour se faire, des quartiers entiers sont livrés aux promoteurs immobiliers. J’en sais quelqu’chose...
Avant, je n’avais qu’un voisin. Depuis la construction d’un immeuble sur un terrain autrefois occupé par un bosquet, j’ai une dizaine de voisins qui ont une vue plongeante sur mon jardin. Être dans son jardin et voir tous ces gens est un bonheur exquis.

Pour appuyer le fait que la ville devient de plus en plus artificielle et non verte, je me suis amusé à faire quelques avant/après sur Google Street View™. Cet outil est génial pour se rappeler comment certains lieux ont évolué (en bien ou en mal) en quelques années et aussi palier à quelques problèmes de mémoire, volontaires ou non.
Ces quelques vues ne concernent que le centre-ville, je n’évoque même les autres quartiers et village de l’entité, où c’est également la fête à la bétonneuse.
Deux autres lieux ont subi les affres des tronçonneuses mais pour eux, impossible de faire un avant/après : le parc du Bois de Boulogne, rasé pour y faire un parking souterrain, et la place Gérard Kasiers où l’on trouvait quelques beaux arbres, mais qui ont dû laisser place nette pour le renouvellement du pavement de la place. Visiblement, conserver ces arbres était impossible. Ben voyons !

Photos

Avenue Reine Astrid

De grandes pelouses remplacées par des parkings et d’innombrables poteaux et panneaux.
Une mise en valeur de rêve pour le vénérable Château des Comtes.

Avenue Royale

La conciergerie de l’ancien hôpital civil et son petit parc détruits pour laisser place à l’horreur du nouveau bâtiment du CPAS.
Un chef d’œuvre en devenir.

Parking Métropole

Encore un parking, mais autrefois arboré.
Désormais un site d’une grande beauté à deux pas de la Grand’Place.

Patte d'Oie

Un bosquet sauvage autrefois occupé par une ferme.
Le nouveau blockhaus est tellement plus agréable, non ?

Rue de Courtrai

Le siège de l’administration communale a montré l’exemple en matière d’abatage d’arbres et d’artificialisation des sols.
Heureusement, le parking sera bientôt agrémenté de trois arbres. Nous voilà sauvés !

Rue de la Coquinie

Une aire de jeux arborée, pourquoi faire ?
Construisons-y un parking !

Rue de Roubaix

Des champs en pleine ville, pourquoi faire ?
Ça manque d’appartements dans le coin !

Rue des Moulins

Une belle villa et son parc sacrifiés pour un promoteur immobilier.
 

Rue du Bas-Voisinage

Un tout petit massif arboré, certes, mais pourquoi l’avoir détruit pour le remplacer par un arbuste et des mauvaises herbes ?
 

Rue du Billemont

Un terrain vague regagné par la nature, mais pas pour longtemps...
 

Rue du Roi Chevalier

Un bel alignement de bouleaux et des espaces ouverts, pourquoi faire ?
 

Rue du Val

Peut-être le pire attentat écologique dans le centre-ville.
Tout un parc rasé pour y chier ces merdes de béton.



Notes

  1. Ville de Mouscron - Les bassins du parc communal vont se refaire une beauté
  2. Ville de Mouscron - Aménagement du territoire - Résumé non technique

Pages connexes

  • J’ai été faire quelques photos dans notre pauvre parc communal à deux reprises : en 2012 et en 2014.
  • En matière d’urbex, quelques rues ont abrité des spots que j’ai eu la chance de pouvoir visiter. À la rue du Val, on y trouvait la Villa Krisner et la Maison Duval. Sise rue des Moulins se trouvait la Villa du Dentiste. Quant au Château des Comtes, avenue Reine Astrid, il est évoqué sur la page parlant de mes débuts d ans le monde de l’urbex.

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